Fruits et légumes bio en supermarché: est-ce vraiment une bonne idée?
En 1992, Carrefour a été le premier supermarché à se lancer dans la vente du bio:
avant cela, seuls les magasins spécialisés proposaient des produits issus de l’agriculture
biologique. Cependant, ce n’est qu’en 2008 que le commerce du bio en grande surface se
développa vraiment, et que le supermarché lança sa fameuse campagne “le bio pas cher et
accessible à tous”. Selon une étude de l’Agence Bio, presque 10 ans après, en 2017, 43%
des ventes de bio se font dans des supermarchés. Mais alors, acheter ses fruits et légumes
bio en grande surface est-ce vraiment une bonne idée?
Le business du bio
Malheureusement, les supermarchés ne se sont pas engagés dans le commerce du
bio uniquement pour des motivations éthiques ou écologiques. Le business du bio présente
un réel impact sur les chiffres d'affaires des supermarchés: il n’y a pas seulement le prix de
la matière première qui augmente lorsqu’elle est bio; les marges le font aussi! Selon une
étude de Que Choisir en 2019, les marges des fruits et légumes bio en grande surface sont
75% plus élevées que les produits conventionnels. Selon le produit, ce chiffre peut même
augmenter: sur les trois fruits et légumes les plus consommés (la pomme de terre, la tomate
et la pomme), les marges brutes peuvent aller jusqu’à 149% de plus que le conventionnel.
Enfin, le poireau bio est le légume ayant la marge brute la plus élevée: il rapporte en
moyenne 165% en plus que son ami conventionnel.
Un des critères pour qu’un produit soit bio est l’absence de produits phytosanitaires
ou de nettoyage. Ainsi, les grandes surfaces qui vendent des produits conventionnels ainsi
que des produits bio doivent impérativement les séparer l’un de l’autre. Leur solution à cela
est donc d’emballer les produits bio dans des kilos de plastique, geste évidemment
désastreux écologiquement. Cela est également une opération marketing, puisque les
emballages de ces produits sont sans exception verts, avec des logos qui attirent l'œil du
consommateur et le mot “BIO” toujours mis en avant, insinuant que l’achat est un geste bon
pour la planète alors que ce n’est évidemment pas toujours le cas.
Afin d’atteindre un prix agricole le plus bas possible et de vendre leurs produits
moins chers que les magasins spécialisés, la stratégie des grandes surfaces repose sur
trois actions clés. Tout d’abord, celle de respecter au minimum le cahier des charges
européen: les fruits et légumes sont souvent cultivés en serre, hors saison, avec engrais...
car malheureusement aucune loi n’interdit cela pour les produits bio. Ensuite, les
supermarchés font très majoritairement des achats de marchandises via des centrales
d’achats ou des intermédiaires mettant en concurrence les agriculteurs et les forçant donc à
baisser leurs prix afin d’être choisis parmi les centaines d’autres options. Enfin, la vente de
fruits et légumes en supermarché repose sur un critère: l’importation. Certains pays, tels que
l’Espagne, le Maroc ou l’Italie, disposent de main-d'œuvre extrêmement peu coûteuse,
surtout comparée à celle en France: cela présente un réel manque à gagner pour les
agriculteurs français.
Le bio, mais de l’autre bout du monde
Bio ne signifie pas local: énormément de fruits et légumes bio sont importés d’autres
pays, européens ou non. Cela permet une main d'œuvre moins coûteuse, mais facilite
également la fraude. Alors qu’en France l’agriculture bio est soigneusement réglementée,
avec des contrôles par Ecocert ou Bureau Veritas qui se font en moyenne 1,6 fois par an
selon Ecocert, avec 30% de visites ‘surprises’ où l’agriculteur n’a pas été prévenu en
avance, d’autres pays suivent des règles moins strictes. L’Espagne par exemple, n'inspecte
ses agriculteurs qu’une seule fois par an, avec un total de visites imprévues de 17%, et en
Roumanie, seulement 5% des agriculteurs sont contrôlés, avec 5% de ses visites des visites
‘surprises’. La transportation par avion des produits importés est également un désastre
écologique auquel il faut absolument remédier. Acheter bio n’est donc pas suffisant pour
réaliser une action écologique: la production locale est cruciale.
Le trio gagnant
Pour faire un véritable geste écologique en achetant ses fruits et légumes, il faut se
concentrer sur trois critères: bio, local et de saison! Les produits bio de supermarché étant
bien souvent produits en serre, ou cultivés hors saison, la priorisation des petits producteurs
ou des magasins spécialisés est donc la meilleure option à notre disposition.
Bibliographie
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